En réponse à Patrick Lagacé, sur ce texte très pertinent:
http://plus.lapresse.ca/screens/39b50034-dbec-41dd-abd0-15aafee558d4__7C___0.html?utm_medium=Ulink&utm_campaign=Internal+Share&utm_content=Screen&fbclid=IwAR2NDgHOSPUKTxC4uJEIPLOs-1U7FWhtNUcVTGHBvT5Db_zKUt0Ydo-wbgU
M. Lagacé,
J'ai lu "Le ciel est backorder".
J'en ai une profonde empathie, même si je ne me reconnais pas dans vos propos.
Il y a quoi, 2 ans, peut être un peu plus, j'ai été voir ma médecin de famille en résidence, sous les conseils avisés de ma soeur cadette, travailleuse sociale, et de mon ex, travailleur social aussi. Je voulais me suicider.
À cette résidente, je voulais pas trop me confier. Fuck man, déjà que je trouve que les médecins de famille savent un peu tout et rien en même temps, penses-tu franchement que je vais me confier à toi, jeune universitaire pleine d'ambitions?
Je sais plus trop ce que je lui ai dit. Probablement que ça impliquait des somnifères, un bain, un x-acto et un sac de plastique sur la tête. J'avais peur de me manquer, que j'ai dû le dire ça aussi, parce que c'était la seule et unique raison pourquoi je ne le faisait pas.
Elle a essayé de me faire parler. J'ai texté mon ex à la place, histoire de lui dire combien je me sentais jugée par cette jeune adulte de 23 ans qui se faisait justement observer par 2 professionnels, cachés derrière leur fenêtre miroir. Combien je la trouvait impertinente. Combien je la connaissais pas, mais que je la méprisais.
Il a rit, parce que c'est trop moi, et m'a encouragé, que ça allait bien aller.
Bref.
On va faire un suivi, c'est le vague souvenir que j'en ai.
Mais un soir, après avoir essuyé un autre commentaire méprisant de ma supérieure. Un autre coup dans ce harcèlement psychologique de cette criss de folle, qui m'appelait et me textait à répétition pour des conneries si je ne rentrais pas au travail, cette incompétente, qui me sacrait après, qui sacrait après tout le monde, qui me suivait partout où j'allais dans le bureau, "parce qu'en tant que supérieure, il fallait bien qu'elle sache ce que je faisais", et que si je parlais à un.e autre collègue, elle me demandais si je parlais d'elle, qui pensait que j'encourageais tout le monde à l'haïr, cette folle, dont le responsable des RH m'a dit finalement de juste endurer mon calvaire, avait frappé encore.
Je me souviens d'être partie du travail, la respiration haletante, l'orgueil qui me poussait à ne pas pleurer, surtout pas tant que je ne serais pas revenue à la maison.
Non, personne ne me verrait pleurer à cause de cette conne. Jamais.
J'ai été attaquée par un Pitt Bull, je ferai de la physiothérapie toute ma vie, mais cette douleur, c'est celle qui m'aura fait le plus mal dans toute ma jeune et court existence.
Je me rappelle avoir pleuré toute la soirée. D'avoir appelé mon copain. Je me souviens qu'il m'a dit "qu'il n'était pas la personne à qui parler de ça". (lire l'article "Valentin" de ce blogue)
Je me souviens que ça m'a fait mal.
Que je l'aimais.
Beaucoup.
Et qu'il n'était pas là pour moi, au jour le plus sombre de ma vie.
J'ai appelé le centre de crise. Ça m'a apaisé, même si je ne me souviens plus du tout de ce que la dame m'a dit.
J'avais une rencontre de prévu le lendemain avec ma super supérieure et le directeur. La dame m'avait apaisé, je m'en souviens, ça allait bien aller.
Mais fuck, à 2 heures du matin, je me réveille en panique.
Rien ne va plus.
Fouille moi pourquoi, même si j'ai le pitonnage du numéro du centre de crise rapide, ça ne marche juste plus et je n'appelle pas. "Je ne veux pas déranger", être la gossante de service.
Mais j'avais peur de me manquer.
J'ai ligné toutes mes petites pilules sur le comptoir. Est-ce que ce sera assez?
J'ai pris l'x-acto. Tenté de m'ouvrir les veines. Ça fait mal, je ne veux plus avoir mal.
J'ai mis le sac sur ma tête. Pour essayer. J'ai peur.
J'ai finalement gobbé une partie des somnifères. Une boîte.
J'ai appelé l'ambulance.
Sais pas pourquoi.
2 policiers, trois ambulancier.
Guillaume le stagiaire, qui m'explique qu'il doit me poser des questions, puisqu'il est en apprentissage. Criss, je peux-tu parler à un "vrai" professionnel un moment donné?!?
Pis mange donc un esti de char bourré de marde Guillaume le Stagiaire!!! T'es tu un psy? Non? So shut de fuck up!!!
Je lui ai dit pas trop loin de ces mots là, parce que le policier m'a repris en me disant:
-Hey, c'est toi qui a appelé, on est là pour t'aider, collabore!
J'ai expiré. Je me suis excusée à Guillaume le stagiaire et lui ai expliqué que là là, je n'allais pas bien et que je ne me sentais pas apte à répondre à ces (criss) de questions.
L'autre ambulancier a repris le flambeau. Questions simples. Oui, non, sais pas. Ça va "mieux".
Le buzz pogne dans l'ambulance. Mon corps essais de rejeter les somnifères. Guillaume le stagiaire est ben fin, il m'a donné un sac et m'a aidée à sortir de l'ambulance.
Je suis plus capable d'entendre, de parler, de bouger.
Une espèce de larve en chaise roulante.
Je réalise que si j'arrête d'essayer de faire des phrases, je suis capable de comprendre ce que les gens me disent. Je réponds donc seulement en hochant la tête "oui" ou "non" quand l'infirmière me pose des questions.
On est venu me voir plusieurs fois pendant la nuit. Médecins, psychiatres, name it.
J'ai passé 4 jours à l'hôpital, en psychiatrie.
À se "reposer" qu'ils disent.
Fuck, man, est où mon estime de moi en jaquette à flocons bleus, les jambes pas rasées, pas de make up, pas de déodorant, rien! Je peux tu te dire que t'as juste envie de décâlisser au plus criss?
Pis en plus! Ma riss de folle me texte à répétition, même si j'ai appelé le directeur et son adjointe pour lui expliquer la situation et ils m'ont tout dit ce que je devais faire pour mon congé. Ben non, 4 textos en genre 30 minutes.
Chaque sonneries me faisait augmenter mon rythme cardiaque. J'ai dû rappeler l'Adjointe pour lui dire de passer le mot que personne sauf elle et le directeur n'ont le droit de me contacter. Ça pis mon copain qui me laisse, parce que tsé, il ne peut pas dealer avec ça, une suicidaire.
You know, joy.
J'ai été vue par des psychiatres, des travailleurs sociaux, des psychologues.
Ils m'ont retournée chez moi. Je ne sais même plus ce qu'ils ont dit au juste. Mais je sais qu'ils ont dit que j'étais forte (yeah, right, parles-moi de ça dans mes culottes de pyjamas ---j'avais eu la permission de retirer l'horrible jacquette bleue--- dans un moment où mon "highlight" de la journée est l'arrivée du plat de patates pilées ...)
J'avais hâte de voir mes parents.
Mon père m'a dit: "R'fais jamais ça!!!" d'un ton réprobateur.
Ma mère a comparé ma situation au travail avec sa collègue désagréable. Tsé, confondre harcèlement psychologique d'une supérieure avec "j'aime pas ma collègue"...
J'avais hâte qu'ils partent.
Mon directeur, ça je vais toujours m'en souvenir, m'a dit que :"Ce n'était pas juste à cause du travail, j'avais des problèmes relationnels aussi, là..."
J'ai commencé à être prise en charge par une psy du CLSC pas longtemps après. Je suis toujours suivi, et je n'ai jamais été un numéro parmi tant d'autres.
J'ai été appelée pour un autre emploi pas longtemps après, lucky I am.
Mais tsé, que serait-il arrivé si j'étais restée là? Où les burn out pullulent comme la peste, mais tsé, qu'on a qu'à endurer?
Tu sais Patrick, je suis d'accord que ça devrait changer. Mais quand je lis ça, je me rappelle que les RH n'ont rien fait pour moi, que mon copain m'a laissée pendant que j'étais à l'hôpital, que ma criss de folle de boss m'a harcelée, même à l'hôpital, qu'une collègue a refusé de venir me porter des vêtements et du savon parce qu'elle n'avait pas l'argent, même si j'allais la rembourser (une autre est venue, la meilleure, sérieusement ;) ), que même mes parents malgré que je sais qu'ils se voulaient "encourageants", qu'ils voulaient me montrer qu'ils m'aimaient et ont eu peur, ont eu des paroles de M-A-R-D-E, que mon directeur, même après ça, refusait de croire que c'était du harcèlement psychologique... Oh, et aussi, il y a les gens qui me disaient que j'avais "juste" à changer de job.
Hey, tsé quand t'as ton estime à terre, sais-tu ce que ça représente d'envoyer des cv, d'être refusée, d'aller en entrevue et d'essayer de te vendre, de donner ton 110%? C'est ça, t'as "juste" à changer de job...
Tsé Patrick, moi, dans toute cette aventure là, j'ai rien à dire sur les institutions et les professionnels qui m'ont accueillit. Est-ce que je trouve fucking ordinaire d'avoir eu à me rendre là pour avoir ces services? Of course.
Mais si tous les gens que tu as nommé, qui ont passé à l'acte quelques jours après être sortis de l'hôpital ont un entourage qui ne sait pas écouter ou qui ne tolère pas la souffrance (parce que la souffrance c'est pas bien, c'est pas beau), qui veut aider, mais aide tout croche, t'es pas plus avancé. Que t'ailles passé une nuit ou 1 mois à l'hôpital. Les seules personnes qui m'ont été vraiment d'aide, ont été les 2 qui avaient une formation en travail social.
Je ne compte même plus la quantité de propos "bienveillants mais insultants" qui m'ont été dit à cette période de ma vie, quand tout ce que tu veux entendre c'est le silence, pour une fois.
Que l'état améliore les chose, oui, d'accord. De toute façon, tout est destiné à être améliorer, right?
Mais sérieusement, des cours à l'école où on apprends à dealer avec la souffrance, la différence, ça devrait se donner. Parce que tout le monde sait communiquer, mais personne sait comment bien le faire quand c'est le temps.
Tout le monde veut aider, mais quand ça implique de se dire qu'on est dans le tort, on dirait que ça leur tente plus ben ben, hein?
J'aimerais ça pouvoir cibler l'État du doigt en lui incriminant la responsabilité de tous ces suicides, mais il a été là pour moi. Pour mon entourage par exemple, c'était une autre paire de manches...
Donc M. Lagacé, j'espère que vos propos auront les mêmes impacts que vos autres articles que vous avez cité dans votre chronique. Qu'ils feront changer les choses.
Et je vous souhaite, quand vous aurez un proche qui vit cette situation, de savoir dire que vous comprenez, que vous êtes là pour parler, même à 3:00 du matin, que vous accueillerez cette personne chez vous quelques jours si son environnement est toxique et l'accompagnerez dans ses démarches, en avouant que c'est rough, que c'est dur, que c'est dur de parler à un inconnu au bout du fil, de chercher un nouvel emploi, d'avouer qu'on ne va pas bien et (pire!) de le dire. Que vous n'enroberez jamais rien de licornes et de glitters, ne banaliserez pas la souffrance avec des phrases comme "t'as juste à le laisser!", "t'as juste à l'éviter!", "t'as juste à changer de job!" ou avec des discours moralisateurs ou sur l'importance de vivre. Asti qu'on veut rien entendre de ça et que tout le monde nous le chante à fond de train.
Bref, que vous saurez accueillir la souffrance et l'accepterez.
Cordialement,
Une fille pas ben ben certaine que vous lirez ça un jour.
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M. Lagacé,
J'ai lu "Le ciel est backorder".
J'en ai une profonde empathie, même si je ne me reconnais pas dans vos propos.
Il y a quoi, 2 ans, peut être un peu plus, j'ai été voir ma médecin de famille en résidence, sous les conseils avisés de ma soeur cadette, travailleuse sociale, et de mon ex, travailleur social aussi. Je voulais me suicider.
À cette résidente, je voulais pas trop me confier. Fuck man, déjà que je trouve que les médecins de famille savent un peu tout et rien en même temps, penses-tu franchement que je vais me confier à toi, jeune universitaire pleine d'ambitions?
Je sais plus trop ce que je lui ai dit. Probablement que ça impliquait des somnifères, un bain, un x-acto et un sac de plastique sur la tête. J'avais peur de me manquer, que j'ai dû le dire ça aussi, parce que c'était la seule et unique raison pourquoi je ne le faisait pas.
Elle a essayé de me faire parler. J'ai texté mon ex à la place, histoire de lui dire combien je me sentais jugée par cette jeune adulte de 23 ans qui se faisait justement observer par 2 professionnels, cachés derrière leur fenêtre miroir. Combien je la trouvait impertinente. Combien je la connaissais pas, mais que je la méprisais.
Il a rit, parce que c'est trop moi, et m'a encouragé, que ça allait bien aller.
Bref.
On va faire un suivi, c'est le vague souvenir que j'en ai.
Mais un soir, après avoir essuyé un autre commentaire méprisant de ma supérieure. Un autre coup dans ce harcèlement psychologique de cette criss de folle, qui m'appelait et me textait à répétition pour des conneries si je ne rentrais pas au travail, cette incompétente, qui me sacrait après, qui sacrait après tout le monde, qui me suivait partout où j'allais dans le bureau, "parce qu'en tant que supérieure, il fallait bien qu'elle sache ce que je faisais", et que si je parlais à un.e autre collègue, elle me demandais si je parlais d'elle, qui pensait que j'encourageais tout le monde à l'haïr, cette folle, dont le responsable des RH m'a dit finalement de juste endurer mon calvaire, avait frappé encore.
Je me souviens d'être partie du travail, la respiration haletante, l'orgueil qui me poussait à ne pas pleurer, surtout pas tant que je ne serais pas revenue à la maison.
Non, personne ne me verrait pleurer à cause de cette conne. Jamais.
J'ai été attaquée par un Pitt Bull, je ferai de la physiothérapie toute ma vie, mais cette douleur, c'est celle qui m'aura fait le plus mal dans toute ma jeune et court existence.
Je me rappelle avoir pleuré toute la soirée. D'avoir appelé mon copain. Je me souviens qu'il m'a dit "qu'il n'était pas la personne à qui parler de ça". (lire l'article "Valentin" de ce blogue)
Je me souviens que ça m'a fait mal.
Que je l'aimais.
Beaucoup.
Et qu'il n'était pas là pour moi, au jour le plus sombre de ma vie.
J'ai appelé le centre de crise. Ça m'a apaisé, même si je ne me souviens plus du tout de ce que la dame m'a dit.
J'avais une rencontre de prévu le lendemain avec ma super supérieure et le directeur. La dame m'avait apaisé, je m'en souviens, ça allait bien aller.
Mais fuck, à 2 heures du matin, je me réveille en panique.
Rien ne va plus.
Fouille moi pourquoi, même si j'ai le pitonnage du numéro du centre de crise rapide, ça ne marche juste plus et je n'appelle pas. "Je ne veux pas déranger", être la gossante de service.
Mais j'avais peur de me manquer.
J'ai ligné toutes mes petites pilules sur le comptoir. Est-ce que ce sera assez?
J'ai pris l'x-acto. Tenté de m'ouvrir les veines. Ça fait mal, je ne veux plus avoir mal.
J'ai mis le sac sur ma tête. Pour essayer. J'ai peur.
J'ai finalement gobbé une partie des somnifères. Une boîte.
J'ai appelé l'ambulance.
Sais pas pourquoi.
2 policiers, trois ambulancier.
Guillaume le stagiaire, qui m'explique qu'il doit me poser des questions, puisqu'il est en apprentissage. Criss, je peux-tu parler à un "vrai" professionnel un moment donné?!?
Pis mange donc un esti de char bourré de marde Guillaume le Stagiaire!!! T'es tu un psy? Non? So shut de fuck up!!!
Je lui ai dit pas trop loin de ces mots là, parce que le policier m'a repris en me disant:
-Hey, c'est toi qui a appelé, on est là pour t'aider, collabore!
J'ai expiré. Je me suis excusée à Guillaume le stagiaire et lui ai expliqué que là là, je n'allais pas bien et que je ne me sentais pas apte à répondre à ces (criss) de questions.
L'autre ambulancier a repris le flambeau. Questions simples. Oui, non, sais pas. Ça va "mieux".
Le buzz pogne dans l'ambulance. Mon corps essais de rejeter les somnifères. Guillaume le stagiaire est ben fin, il m'a donné un sac et m'a aidée à sortir de l'ambulance.
Je suis plus capable d'entendre, de parler, de bouger.
Une espèce de larve en chaise roulante.
Je réalise que si j'arrête d'essayer de faire des phrases, je suis capable de comprendre ce que les gens me disent. Je réponds donc seulement en hochant la tête "oui" ou "non" quand l'infirmière me pose des questions.
On est venu me voir plusieurs fois pendant la nuit. Médecins, psychiatres, name it.
J'ai passé 4 jours à l'hôpital, en psychiatrie.
À se "reposer" qu'ils disent.
Fuck, man, est où mon estime de moi en jaquette à flocons bleus, les jambes pas rasées, pas de make up, pas de déodorant, rien! Je peux tu te dire que t'as juste envie de décâlisser au plus criss?
Pis en plus! Ma riss de folle me texte à répétition, même si j'ai appelé le directeur et son adjointe pour lui expliquer la situation et ils m'ont tout dit ce que je devais faire pour mon congé. Ben non, 4 textos en genre 30 minutes.
Chaque sonneries me faisait augmenter mon rythme cardiaque. J'ai dû rappeler l'Adjointe pour lui dire de passer le mot que personne sauf elle et le directeur n'ont le droit de me contacter. Ça pis mon copain qui me laisse, parce que tsé, il ne peut pas dealer avec ça, une suicidaire.
You know, joy.
J'ai été vue par des psychiatres, des travailleurs sociaux, des psychologues.
Ils m'ont retournée chez moi. Je ne sais même plus ce qu'ils ont dit au juste. Mais je sais qu'ils ont dit que j'étais forte (yeah, right, parles-moi de ça dans mes culottes de pyjamas ---j'avais eu la permission de retirer l'horrible jacquette bleue--- dans un moment où mon "highlight" de la journée est l'arrivée du plat de patates pilées ...)
J'avais hâte de voir mes parents.
Mon père m'a dit: "R'fais jamais ça!!!" d'un ton réprobateur.
Ma mère a comparé ma situation au travail avec sa collègue désagréable. Tsé, confondre harcèlement psychologique d'une supérieure avec "j'aime pas ma collègue"...
J'avais hâte qu'ils partent.
Mon directeur, ça je vais toujours m'en souvenir, m'a dit que :"Ce n'était pas juste à cause du travail, j'avais des problèmes relationnels aussi, là..."
J'ai commencé à être prise en charge par une psy du CLSC pas longtemps après. Je suis toujours suivi, et je n'ai jamais été un numéro parmi tant d'autres.
J'ai été appelée pour un autre emploi pas longtemps après, lucky I am.
Mais tsé, que serait-il arrivé si j'étais restée là? Où les burn out pullulent comme la peste, mais tsé, qu'on a qu'à endurer?
Tu sais Patrick, je suis d'accord que ça devrait changer. Mais quand je lis ça, je me rappelle que les RH n'ont rien fait pour moi, que mon copain m'a laissée pendant que j'étais à l'hôpital, que ma criss de folle de boss m'a harcelée, même à l'hôpital, qu'une collègue a refusé de venir me porter des vêtements et du savon parce qu'elle n'avait pas l'argent, même si j'allais la rembourser (une autre est venue, la meilleure, sérieusement ;) ), que même mes parents malgré que je sais qu'ils se voulaient "encourageants", qu'ils voulaient me montrer qu'ils m'aimaient et ont eu peur, ont eu des paroles de M-A-R-D-E, que mon directeur, même après ça, refusait de croire que c'était du harcèlement psychologique... Oh, et aussi, il y a les gens qui me disaient que j'avais "juste" à changer de job.
Hey, tsé quand t'as ton estime à terre, sais-tu ce que ça représente d'envoyer des cv, d'être refusée, d'aller en entrevue et d'essayer de te vendre, de donner ton 110%? C'est ça, t'as "juste" à changer de job...
Tsé Patrick, moi, dans toute cette aventure là, j'ai rien à dire sur les institutions et les professionnels qui m'ont accueillit. Est-ce que je trouve fucking ordinaire d'avoir eu à me rendre là pour avoir ces services? Of course.
Mais si tous les gens que tu as nommé, qui ont passé à l'acte quelques jours après être sortis de l'hôpital ont un entourage qui ne sait pas écouter ou qui ne tolère pas la souffrance (parce que la souffrance c'est pas bien, c'est pas beau), qui veut aider, mais aide tout croche, t'es pas plus avancé. Que t'ailles passé une nuit ou 1 mois à l'hôpital. Les seules personnes qui m'ont été vraiment d'aide, ont été les 2 qui avaient une formation en travail social.
Je ne compte même plus la quantité de propos "bienveillants mais insultants" qui m'ont été dit à cette période de ma vie, quand tout ce que tu veux entendre c'est le silence, pour une fois.
Que l'état améliore les chose, oui, d'accord. De toute façon, tout est destiné à être améliorer, right?
Mais sérieusement, des cours à l'école où on apprends à dealer avec la souffrance, la différence, ça devrait se donner. Parce que tout le monde sait communiquer, mais personne sait comment bien le faire quand c'est le temps.
Tout le monde veut aider, mais quand ça implique de se dire qu'on est dans le tort, on dirait que ça leur tente plus ben ben, hein?
J'aimerais ça pouvoir cibler l'État du doigt en lui incriminant la responsabilité de tous ces suicides, mais il a été là pour moi. Pour mon entourage par exemple, c'était une autre paire de manches...
Donc M. Lagacé, j'espère que vos propos auront les mêmes impacts que vos autres articles que vous avez cité dans votre chronique. Qu'ils feront changer les choses.
Et je vous souhaite, quand vous aurez un proche qui vit cette situation, de savoir dire que vous comprenez, que vous êtes là pour parler, même à 3:00 du matin, que vous accueillerez cette personne chez vous quelques jours si son environnement est toxique et l'accompagnerez dans ses démarches, en avouant que c'est rough, que c'est dur, que c'est dur de parler à un inconnu au bout du fil, de chercher un nouvel emploi, d'avouer qu'on ne va pas bien et (pire!) de le dire. Que vous n'enroberez jamais rien de licornes et de glitters, ne banaliserez pas la souffrance avec des phrases comme "t'as juste à le laisser!", "t'as juste à l'éviter!", "t'as juste à changer de job!" ou avec des discours moralisateurs ou sur l'importance de vivre. Asti qu'on veut rien entendre de ça et que tout le monde nous le chante à fond de train.
Bref, que vous saurez accueillir la souffrance et l'accepterez.
Cordialement,
Une fille pas ben ben certaine que vous lirez ça un jour.
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