En travaillant dans le public, ça devient quelque peu inévitable.
Même si tu t'efforce à parler comme du monde.
À bien prononcer.
À tenter d'être une peu plus "internationale".
T'as le "è" de jamais (jama) qui te sort de la bouche à un moment ou à un autre.
Et là tu vois le visage qui change.
Que tu sois en train de parler du traumatisme du génocide culturel des premières nations avec grande éloquence et passion n'a plus AUCUNE importance.
"Tu viens du Saguenay?" te demande ce visage qui soudainement, semble trouver une certaine complicité (non désirée) avec ta personne.
"Non" que je réponds, simplement, en espérant que ça sera suffisant pour créer un malaise devant l'impertinence de la remarque à ce moment précis de ta vie.
"Haaaaaaa, tu viens du Lac, c'est ça hein? On le sait qu'il faut pas mélanger les deux, hahahahahahahahahahahahahahahahahahahahahahh"
(En fait elle ne rit pas tant que ça. Tu trouves juste ça inopportun donc tu y donne beaucoup trop d'emphase dans ton billet de blogue.)
"Oui, effectivement, je viens du Lac-Saint-Jean." Que je répond en pensant: "Pis que cé que ça te crisse ben honnêtement? Es-tu vraiment venue dans un musée dans le but premier de voir un spécimen de native du Lac ou pour parler de l'histoire des Amérindien?"
"Ha oui, d'où?"
Tu aimerais vraiment juste rouler des yeux direct dans sa face.
Mais la "politesse du service à la clientèle" t'en empêche.
Donc tu réponds juste froidement:
"Un petit village qui n'est pas sur la route, vous n'y êtes probablement jamais allé. Donc nous allons passer à la pièce suivante..."
" Non mais où? Je connais telle personne qui habite Alma, on y va souvent au Lac c'est tellement plâazan (plaisant --- médiocre tentative d'imitation de mon accent) pis votre accent est tellement beau!!!"
"Non mais mon village est à une heure trente d'Alma et je ne sais vraiment pas concernant mon accent, j'en ai un partout où je vais maintenant."
Des fois ils comprennent rendus là, des fois non.
Dans le premier cas ils ne comprennent pas trop pourquoi la tentative de "chummy - chummy" ne fonctionne pas, dans la deuxième, je dois vraiment mettre en valeur que le Lac, je suis bien heureuse d'en être partie et que j'espère pas tellement avoir à y retourner. Et là c'est le malaise.
Des fois ça froisse les gens du Lac que je ne sois "pas fière".
Non. Ça fait juste partie de ma vie, de mon identité.
Je ne suis pas fière de venir du Lac. Il y a des beaux trucs, mais des beaux trucs, il y en a partout.
De manière égale.
Pis l'histoire de l'accent, c'est que je considère que toute identité ne devrait jamais être définie par son lieu de naissance.
Quand on m'interrompt en plein milieu de ma visite guidée, d'un sujet qui me passionne, pour me rappeler que je viens d'une région X ou Y, j'ai l'impression qu'on me retire tout d'un coup tout ce pourquoi j'ai travaillé dur: être moi.
En dehors de pleins de facteurs qui ne m'appartiennent pas. Comme mon lieu de naissance par exemple.
Par contre, la muséologie, c'est une décision qui m'appartient.
C'est une chose dont je suis fière, car j'ai fait beaucoup de sacrifices pour travailler dans ce domaine qui me passionne.
C'est d'ailleurs dans ce contexte là que tu me rencontre.
Je suis là, aujourd'hui, une guide-animatrice qui a plein de choses intéressantes à te dire.
Avec un accent du lac, mais aussi de Québec et de Montréal. Aujourd'hui, j'ai un accent partout où je vais.
Et j'aimerais que tu te concentre sur qui tu as devant toi, maintenant.
Et qu'on parle de ce pourquoi on est dans la même pièce aujourd'hui.
Mais pourras-tu seulement le supporter?
Même si tu t'efforce à parler comme du monde.
À bien prononcer.
À tenter d'être une peu plus "internationale".
T'as le "è" de jamais (jama) qui te sort de la bouche à un moment ou à un autre.
Et là tu vois le visage qui change.
Que tu sois en train de parler du traumatisme du génocide culturel des premières nations avec grande éloquence et passion n'a plus AUCUNE importance.
"Tu viens du Saguenay?" te demande ce visage qui soudainement, semble trouver une certaine complicité (non désirée) avec ta personne.
"Non" que je réponds, simplement, en espérant que ça sera suffisant pour créer un malaise devant l'impertinence de la remarque à ce moment précis de ta vie.
"Haaaaaaa, tu viens du Lac, c'est ça hein? On le sait qu'il faut pas mélanger les deux, hahahahahahahahahahahahahahahahahahahahahahh"
(En fait elle ne rit pas tant que ça. Tu trouves juste ça inopportun donc tu y donne beaucoup trop d'emphase dans ton billet de blogue.)
"Oui, effectivement, je viens du Lac-Saint-Jean." Que je répond en pensant: "Pis que cé que ça te crisse ben honnêtement? Es-tu vraiment venue dans un musée dans le but premier de voir un spécimen de native du Lac ou pour parler de l'histoire des Amérindien?"
"Ha oui, d'où?"
Tu aimerais vraiment juste rouler des yeux direct dans sa face.
Mais la "politesse du service à la clientèle" t'en empêche.
Donc tu réponds juste froidement:
"Un petit village qui n'est pas sur la route, vous n'y êtes probablement jamais allé. Donc nous allons passer à la pièce suivante..."
" Non mais où? Je connais telle personne qui habite Alma, on y va souvent au Lac c'est tellement plâazan (plaisant --- médiocre tentative d'imitation de mon accent) pis votre accent est tellement beau!!!"
"Non mais mon village est à une heure trente d'Alma et je ne sais vraiment pas concernant mon accent, j'en ai un partout où je vais maintenant."
Des fois ils comprennent rendus là, des fois non.
Dans le premier cas ils ne comprennent pas trop pourquoi la tentative de "chummy - chummy" ne fonctionne pas, dans la deuxième, je dois vraiment mettre en valeur que le Lac, je suis bien heureuse d'en être partie et que j'espère pas tellement avoir à y retourner. Et là c'est le malaise.
Des fois ça froisse les gens du Lac que je ne sois "pas fière".
Non. Ça fait juste partie de ma vie, de mon identité.
Je ne suis pas fière de venir du Lac. Il y a des beaux trucs, mais des beaux trucs, il y en a partout.
De manière égale.
Pis l'histoire de l'accent, c'est que je considère que toute identité ne devrait jamais être définie par son lieu de naissance.
Quand on m'interrompt en plein milieu de ma visite guidée, d'un sujet qui me passionne, pour me rappeler que je viens d'une région X ou Y, j'ai l'impression qu'on me retire tout d'un coup tout ce pourquoi j'ai travaillé dur: être moi.
En dehors de pleins de facteurs qui ne m'appartiennent pas. Comme mon lieu de naissance par exemple.
Par contre, la muséologie, c'est une décision qui m'appartient.
C'est une chose dont je suis fière, car j'ai fait beaucoup de sacrifices pour travailler dans ce domaine qui me passionne.
C'est d'ailleurs dans ce contexte là que tu me rencontre.
Je suis là, aujourd'hui, une guide-animatrice qui a plein de choses intéressantes à te dire.
Avec un accent du lac, mais aussi de Québec et de Montréal. Aujourd'hui, j'ai un accent partout où je vais.
Et j'aimerais que tu te concentre sur qui tu as devant toi, maintenant.
Et qu'on parle de ce pourquoi on est dans la même pièce aujourd'hui.
Mais pourras-tu seulement le supporter?
Commentaires
Enregistrer un commentaire